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La pénalisation du refus de remettre à la justice une clé de déchiffrement est conforme à la Constitution

Pénal - Droit pénal spécial
04/04/2018
La pénalisation du refus de remettre aux autorités judiciaires la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie est conforme à la Constitution.
Toutefois, le Conseil apporte quelques précisions : en imposant à la personne ayant connaissance d'une convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie de remettre ladite convention aux autorités judiciaires ou de la mettre en oeuvre uniquement si ce moyen de cryptologie est susceptible d'avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit et uniquement si la demande émane d'une autorité judiciaire (nous soulignons), le législateur a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des infractions et de recherche des auteurs d'infractions.
 
Ensuite, il faut qu'il soit établi que la personne suspectée d'avoir commis une infraction avait connaissance (nous soulignons) de la convention secrète de déchiffrement pour son moyen de cryptologie. S'il est prouvé qu'elle disposait de cette information au moment des faits pour lesquels elle est poursuivie, alors il est possible de la sanctionner pour son refus de coopérer. Telle est la position adoptée par le Conseil constitutionnel dans sa décision rendue le 30 mars 2018.

Les Sages avaient été saisis par la Cour de cassation le 10 janvier 2018 (Cass. crim., 10 janv. 2018, n° 17-90.019, D). Selon le requérant, les dispositions de l'article 434-15-2 du Code pénal, en ce qu'elles sanctionnent le refus pour une personne suspectée d'une infraction de remettre aux autorités judiciaires, ou de mettre en oeuvre à leur demande, une clé de déchiffrement susceptible d'avoir été utilisée pour commettre cette infraction, porteraient atteinte au droit au silence et au droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination.
 
Enonçant la solution précitée, le Conseil déclare conforme à la Constitution l'article contesté. Il précise par ailleurs que ces dispositions n'ont pas pour objet d'obtenir des aveux et n'emportent ni reconnaissance ni présomption de culpabilité mais permettent seulement le déchiffrement des données cryptées. En outre, l'enquête ou l'instruction doivent avoir permis d'identifier l'existence des données traitées par le moyen de cryptologie susceptible d'avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit. Enfin, ces données, déjà fixées sur un support, existent indépendamment de la volonté de la personne suspectée.
 
Par June Perot
 
Source : Actualités du droit