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La semaine du droit pénal spécial

Pénal - Droit pénal spécial
22/03/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin criminel de la Cour de cassation, en droit pénal spécial, la semaine du 15 mars 2021.
Corruption de mineur – âge  
« Le 31 août 2010, Mme C... X... et sa fille, D... X..., née le [...], se sont présentées au commissariat de police de L’Haÿ-les-Roses (94) pour dénoncer des faits de viol commis par plusieurs pompiers de la caserne de Bourg-la-Reine en novembre 2009.
Au mois de mars 2011, une information judiciaire a été ouverte contre MM. B... Y..., E... Z... et F... W... des chefs de viols et agressions sexuelles sur mineure de 15 ans et sur personne vulnérable, et viols et agressions sexuelles en réunion sur mineure de 15 ans et sur personne vulnérable.
Un réquisitoire supplétif a été pris le 24 septembre 2012 afin d’étendre la saisine du juge d’instruction à des faits d’omission de porter secours à personne en péril, contre MM. G... V..., H... U..., I... T... et J... S..., et contre personne non dénommée des chefs de viols en réunion sur mineure de 15 ans et de corruption de mineure de 15 ans par utilisation d’un réseau de communications électroniques.
Par une ordonnance du 19 juillet 2019, le magistrat instructeur a requalifié les faits de viols et agressions sexuelles sur mineure de 15 ans en réunion commis en novembre 2009 en atteinte sexuelle commise sans violence, contrainte, menace, ni surprise sur mineure de 15 ans, avec cette circonstance que les faits ont été commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complices, et ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel de MM. Y..., Z..., et W....
Il a ordonné un non-lieu pour tous les autres faits dont il était saisi.
Les consorts X... ont relevé appel de cette décision.
 
Vu les articles 227-22 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale :
Selon le premier de ces textes, dans sa version issue de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, le fait de favoriser ou de tenter de favoriser la corruption d’un mineur est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Ces peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsque le mineur est âgé de moins de 15 ans.
Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
Pour confirmer l’ordonnance du juge d’instruction ayant dit n’y avoir lieu à suivre du chef de corruption de mineure de 15 ans par l’utilisation d’un réseau de communications électroniques, l’arrêt énonce que la loi du 5 août 2013 a abrogé la circonstance de la minorité de 15 ans, et réprime désormais la corruption de mineur, sans distinction d’âge.
Les juges relèvent qu’il résulte des déclarations de D... X..., de ses amis, et des sapeurs-pompiers entendus, que c’est la jeune fille qui a sollicité les coordonnées de pompiers célibataires afin de les contacter, notamment via les réseaux sociaux, et qu’elle a également autorisé ceux avec lesquels elle avait été en relation à transmettre ses coordonnées à leurs collègues.
Les juges énoncent que, selon AB... XY..., D... X... a très vite retiré la mention de son âge de son compte Facebook, et qu’après un échange portant sur le métier de pompier, c’est elle qui donnait à la conversation une connotation sexuelle en termes particulièrement crus, et parfois s’exhibait par webcam.
Ils relèvent encore que les pompiers, à l’exception de M. Y..., se sont défendus d’avoir connu son âge exact au moment des faits reprochés, ajoutant que sa morphologie et ses connaissances en matière de sexualité accréditaient la thèse de sa majorité et que les déclarations contraires faites sur ce point par la partie civile, lesquelles ne peuvent être accueillies qu’avec circonspection, en raison de sa propension à travestir la réalité, notamment du fait de la pathologie dont elle est atteinte, ne permettent pas d’établir que les pompiers entrés en contact avec elle par un réseau de communications électroniques savaient qu’elle était mineure.
Ils retiennent qu’en outre, au regard du déroulement des entretiens avec les pompiers, tels que décrits, non seulement par ces derniers, mais encore par l’entourage amical de D... X..., et du comportement adopté par l’intéressée, il n’est pas établi que les mis en cause cherchaient à pervertir l’adolescente, dans la mesure où elle était à l’origine des conversations sexualisées et des exhibitions.
En l’état de ces énonciations, la chambre de l’instruction a violé les textes susvisés.
L’arrêt énonce à tort que la loi du 5 août 2013 a abrogé la circonstance de la minorité de 15 ans, et réprime désormais la corruption de mineur, sans distinction d’âge, alors que, dans sa version issue de la loi n°2007-297 du 5 mars 2007, le texte réprimait déjà la corruption de tout mineur de 18 ans, la minorité spéciale de 15 ans constituant seulement une circonstance aggravante.
Dès lors, iI n’est pas établi que la chambre de l’instruction a recherché si les personnes incriminées avaient connaissance de ce que la plaignante était âgée de moins de 18 ans.
En conséquence, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision et la cassation est encourue de ce chef  ».
Cass. crim., 17 mars 2021, n° 20-85.318, P+ I *
 
 
 
 
*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 22 avril 2021.
 
 
Source : Actualités du droit