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Les fonds octroyés par un consortium privé de banques ne constituent pas une aide d’État

Affaires - Droit économique
Public - Droit public des affaires
08/03/2021
Une banque italienne en difficulté avait bénéficié en 2014 de la couverture de ses fonds propres négatifs par un fonds interbancaire. La Commission a qualifié cette mesure d’aide d’État au motif que les autorités italiennes avaient joué un rôle substantiel dans la décision du fonds. Le Tribunal de l’Union européenne et la Cour de justice désapprouvent. Explications. 
En droit italien, l’adhésion des banques à un système de garantie des dépôts institué et reconnu est un impératif (Testo unico in materia bancaria e creditizia, art. 96). Ce système de garantie a notamment l’obligation d’intervenir en remboursement des déposants en cas de liquidation administrative forcée d’une banque adhérente. Ces interventions sont néanmoins soumises à l’autorisation de la Banca d’Italia. La banque Tercas, banque privée, avait adhéré, à cet effet, au Fondo interbancario di tutela dei depositi (Fonds interbancaire de garantie des dépôts, ci-après « FITD »).

La banque Tercas ayant été placée sous le régime de l’administration extraordinaire par la Banca d’Italia, la Banca Popolare di Bari avait proposé son soutien en acceptant de souscrire à l’augmentation de son capital. Une condition avait toutefois été posée : que le déficit patrimonial de Tercas soit entièrement couvert par le FITD.

Ce dernier s’est alors assuré qu’une intervention préventive serait plus avantageuse économiquement que le remboursement des déposants en cas de liquidation administrative forcée et a accepté de garantir le déficit de Tercas, avec l’autorisation de la Banca d’Italia.

Par une décision du 23 décembre 2015, la Commission a qualifié cette mesure d’aide d’État illégale et en a ordonné la récupération. Le Tribunal, se prononçant sur le recours formé par l’Italie, la Banca d’Italia, la Banca Popolare di Bari et le FITD, avait écarté cette qualification le 19 mars 2019. La CJUE a ensuite confirmé son argumentation.
La CJUE a pu ici rappeler que les critères d’appréciation des aides d’État diffèrent selon que la structure qui octroie la mesure litigieuse est ou non une émanation de l’État. Pour rappel, l’article 107, § 1, TFUE déclare incompatibles avec le marché de l’Union « les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État » qui pourraient fausser la concurrence. Or, en l’occurrence, le FITD est un organisme privé mutualiste. Il incombait donc à la Commission de prouver que l’aide avait été accordée indirectement par des ressources d’État et qu’elle était « imputable » à l’État italien. Or, le Tribunal avait estimé que la Commission n’avait pas suffisamment qualifié le rôle des autorités italiennes dans la prise de décision (leur « influence ou contrôle effectif ») et écarté la qualification d’aide d’État.

La CJUE a également constaté que le Tribunal n’avait pas exigé des standards de preuve différents mais que, en application d’une jurisprudence constante de la CJUE, les indices permettant de conclure à l’imputabilité d’une mesure aux autorités étatiques résultent des circonstances de l’espèce. 
 
Pour aller plus loin
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle privé, voir Le Lamy Droit économiquen° 2210 et suivants.
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle public, voir Le Lamy Droit public des affairesn° 775 et suivants.
Source : Actualités du droit