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Livre III – Dispositions communes aux différentes phases de la procédure pénale

Pénal - Procédure pénale, Informations professionnelles, Droit pénal général
04/11/2019
Le droit applicable à l’enfance délinquante s’est complexifié au fur et à mesure des réformes. Clarifier et simplifier l’ordonnance de 1945, notamment en procédure pénale, sont les finalités de cette codification. Ces améliorations, attendues par les professionnels, restent pour autant critiquables et critiquées.
39. C’est le nombre de réformes qui sont venues modifier, et complexifier, l’ordonnance de 1945. La codification a donc pour objectif de « simplifier la procédure pénale applicable aux mineurs délinquants ».
 
Titre I – Du droit du mineur à l’accompagnement et à l’information
Le titre I du Code de justice des mineurs prévoit que les représentants légaux seront informés des décisions prises à l’égard du mineur et pourront accompagner le mineur à chaque audience et lors de ses auditions ou interrogatoires, uniquement si l’autorité qui procède à cet acte estime que leur présence est dans « l’intérêt supérieur de l’enfant » et si elle ne porte « pas préjudice à la procédure ». Il est précisé que « l’audition ou l’interrogatoire du mineur peut débuter en leur absence à l’issue d’un délai de deux heures à compter du moment où celles-ci ont été avisées ». Dans le cas où l’information des représentants légaux ou leur accompagnement « n’est pas possible ou n’est pas souhaitable », un adulte approprié sera informé et pourra accompagner le mineur (L. 311-1).
 
L’article L. 311-5 prévoit que lorsque les représentants légaux ne défèrent pas à la convocation, la juridiction « peut d’office ou sur réquisition du ministère public, ordonner qu'ils soient immédiatement amenés par la force publique devant lui ou devant elle pour être entendus » ou pourront être condamnés à une amende.
 
Par exception, l’article L. 311-2 prévoit que l’information et l’assistance des titulaires de l’autorité parentale ne sont pas autorisées si elles semblent « contraire à l’intérêt supérieur du mineur », si malgré des efforts raisonnables « aucun des titulaires ne peut être joint ou l’identité est inconnue » ou si elles peuvent « compromettre de manière significative la procédure pénale » sur la base d’éléments objectifs.
 
Pour pallier cette absence (présence impossible ou non souhaitable), le Code prévoit la communication des informations et la présence d’un « adulte approprié », qui au titre de l’article L. 311-3, « a pour rôle de :
1° recevoir l’information relative aux différentes mesures prononcées à l’égard du mineur et des droits qui lui sont notifiés ;
2° l’accompagner lors des audiences et le cas échéant, lors de ses auditions ou interrogatoires » dans les mêmes conditions que les représentants légaux.
 
L’adulte approprié peut aussi demander un examen du mineur gardé à vue, obligatoire s’il n’a pas pu être joint dès le début de la procédure.
 
Comment le désigner ? Le mineur peut désigner lui-même un adulte approprié, qui doit être accepté par l’autorité compétente, pour recevoir les informations et l’accompagner tout au long de la procédure. Et s’il n’est pas accepté ou si le mineur n’en a pas désigné, « le procureur de la République, le juge des enfants ou le juge d'instruction désigne, en tenant compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, une autre personne » ou « cette personne peut également être un représentant d'une autorité ou d'une institution compétente en matière de protection de l'enfance, notamment un représentant ad hoc figurant sur la liste dressée en application de l'article 706-51 du Code de procédure pénale » précise l’article L. 311-2.
 
Titre II – Des investigations et de la mesure éducative judiciaire provisoire
Chapitre I – Dispositions générales
Le premier chapitre comporte un article qui dispose que « La mesure judiciaire d'investigation éducative et la mesure éducative judiciaire provisoire prévues par le présent titre peuvent être prononcées cumulativement entre elles et avec les différentes mesures de sûreté applicables aux mineurs ». Et que, « La mesure judiciaire d'investigation éducative et la mesure éducative judiciaire provisoire déjà prononcées se poursuivent lorsqu'une mesure de sûreté est prononcée à l'encontre d'un mineur » (L. 321-1).
 
Chapitre II- Des informations relatives à la personnalité du mineur
Section I – Des investigations sur la personnalité et la situation du mineur
Des investigations sur la personnalité et la situation du mineur sont obligatoires avant toute mesure éducative ou peine prononcée à l’encontre d’un mineur déclaré coupable d’un crime, d’un délit ou d’une contravention de la cinquième classe. L’objectif étant d’« acquérir une connaissance suffisante de sa personnalité, de sa situation sociale et familiale et pour assurer la cohérence des décisions dont il fait l’objet » (L. 322-1).
 
L’article L. 322-2 en prévoit deux, en plus de l’expertise et des autres mesures d’investigation prévues par le Code de procédure pénale :
  • le recueil de renseignements socio-éducatifs : « évaluation synthétique des éléments relatifs à la personnalité et à la situation du mineur » (L. 322-3) ; il est obligatoire « avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire ou de prolongation de la détention provisoire d’un mineur mis en examen ou convoqué devant une juridiction de jugement » (L. 322-5) ;
  • la mesure judiciaire d’investigation éducative : « évaluation approfondie et interdisciplinaire de la personnalité et de la situation du mineur, y compris, le cas échéant, sur le plan médical » (L. 322-7), elle peut être ordonnée par les juridictions spécialisées mais aussi mise en œuvre par les services et établissements de la protection judiciaire de la jeunesse ou du secteur associatif habilité.
Ces deux mesures doivent donner lieu à un rapport avec tous les renseignements utiles, une proposition éducative ou des mesures propres à favoriser son insertion sociale. 
 
Section II – Du dossier unique de personnalité
Un « dossier unique de personnalité » peut être constitué par le juge des enfants qui connaît le mineur quand ce dernier fait l’objet « d’une mesure de sûreté, d’une mesure éducative ou d’une mesure d’investigation autre qu’un recueil de renseignements socio-éducatifs ». Mais aussi « lorsque qu'il est saisi de l'application d'une peine ou d'une mesure éducative prononcée par une juridiction de jugement pour mineur » (L. 322-8).
 
Il doit contenir « les copies des pièces relatives à la personnalité du mineur recueillies dans les procédures pénales dont il fait ou a fait l’objet » et « les copies des pièces utiles relatives à sa personnalité et à son environnement social et familial émanant des procédures d’assistance éducative dont il fait ou a fait l’objet » (L. 322-9). Le juge d’instruction devra transmettre au juge des enfants les pièces devant être versées au dossier quand il sera saisi d’une procédure concernant un mineur.
 
L’article suivant prévoit des conditions de consultation strictes : en pratique, elles seront réservées aux magistrats et juridictions concernés, aux avocats des parties, au mineur sous réserve de certaines conditions, les personnels des établissements et services de la protection judiciaire de la jeunesse et sur autorisation à certains experts selon l’article L. 322-10. « Les informations contenues dans le dossier unique de personnalité sont confidentielles. Le fait, pour une partie à la procédure, de faire état auprès d'un tiers des informations contenues dans le dossier unique de personnalité est puni d'une amende de 3 750 euros » prévoit ce même article.
 
Et le Code précise qu’un décret en Conseil d’État viendra préciser les conditions dans lesquelles ce dossier sera conservé après la majorité du mineur (L. 322-8).

La mesure éducative judiciaire, vue précédemment, « peut être prononcée à titre provisoire à tous les stades de la procédure avant le prononcé de la sanction » (L. 322-1). Le chapitre II organise son application dans ses articles L. 334-1 à L. 334-7.
 
Chapitre III – De la mesure éducative judiciaire provisoire
La mesure éducative judiciaire, vue précédemment, « peut être prononcée à titre provisoire à tous les stades de la procédure avant le prononcé de la sanction » (L. 323-1). La seule limite est qu’au-delà de l’âge de vingt-et-un an, la meure ne peut se poursuivre (L. 323-3). 
 
Par principe, le mineur, assisté d’un avocat et de ses représentants légaux, devra être auditionné avant que soient fixées les modalités et le contenu de la mesure. Une exception est prévue, et permet que soit ordonnée et modifiée la mesure, si le mineur ou ses représentants ne comparaissent pas. L’article 323-2 prévoit aussi qu’à tout moment, « les modalités ou le contenu de la mesure éducative judiciaire provisoire peuvent être modifiées et le juge peut en ordonner la main-levée ». 
 
Titre III – Des mesures de sûreté
Les grandes lignes de l’ordonnance de 1945, en matière de mesures de sûreté sont préservées. Le Conseil national des barreaux a, dans son communiqué publié le 31 octobre, fait savoir qu’il « dénonce une volonté de généraliser le contrôle judiciaire, d’accentuer les mises en détention provisoire, de développer l’assignation à résidence sous surveillance électronique des mineurs, peine totalement inadaptée au mineur ».
 
Chapitre I – Du contrôle judiciaire
Un mineur de moins de treize ans ne peut être placé sous contrôle judiciaire (prévu aux articles L. 331-1 à L. 331-7), au-delà de cet âge, une ordonnance motivée est nécessaire.
 
En effet, au titre de l’article L. 331-1 un mineur âgé de moins de seize ans peut être placé sous contrôle judiciaire, s’il encourt une peine criminelle. Quand il s’agit d’une peine correctionnelle, un débat contradictoire doit avoir lieu (L. 331-4), et la peine d’emprisonnement doit être égale ou supérieure à sept ans ou cinq ans dans l’hypothèse où le mineur a déjà fait l’objet d’une procédure ou dans le cas de violences volontaires, d’agression sexuelle ou un délit avec des violences en circonstance aggravante.
 
Les obligations prévues par le Code à l’article L. 331-2 sont les mêmes que l’article 138 du Code de procédure pénale, sous réserve de quelques modifications spécifiques au mineur. On y trouve notamment : l’interdiction de sortir de limites territoriales, de se rendre dans certains lieux, de participer à des manifestations, ne détenir ou porter une arme, ou encore l’obligation de respecter les conditions d’une prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique.  
 
Le mineur sera informé « qu'en cas de non-respect de ces obligations, il pourra être placé en détention provisoire » (L. 331-3). Cette information nécessite une procédure stricte. Et il est prévu que « Le juge des enfants ou le juge d'instruction peut ordonner la modification ou la main levée du contrôle judiciaire, soit d'office, soit à la demande du mineur, de ses représentants légaux ou de la personne qui en a la garde, soit du procureur de la République » (L. 331-5).
 
Chapitre II – De l’exécution des mandats des juridictions pour mineurs
Les mandats des juridictions pour mineurs (articles L. 332-1 à L. 332-2) : le représentant du mineur (représentants légaux, personne ou service auxquels le mineur est confié ou un autre adulte approprié) doit être informé si le mineur est retenu dans le cadre d’un mandat de comparution, d’amener ou d’arrêt, dès le début de la rétention. Le mineur doit être assisté par un avocat, être examiné et les auditions devront être enregistrées.
 
Lors de l’audience relative à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, qui ne peut être publique, le mineur doit être assisté d’un avocat de son choix ou pour un avocat commis d’office désigné par le bâtonnier.
 
Chapitre III – De l’assignation à résidence avec surveillance électronique
Cette mesure prévue aux articles L. 333-1 et L. 333-2 concerne les mineurs âgés d’au moins seize ans encourant une peine d’emprisonnement égale ou supérieure à trois ans. « Ces juridictions (juge des enfants, tribunal pour enfants, juge d’instruction ou juge des libertés et la détention) statuent après avis du service de la protection judiciaire de la jeunesse ou du service pénitentiaire d'insertion et de probation si l'intéressé est majeur au moment de la décision ». Néanmoins, la procédure de placement sous surveillance électronique mobile n’est pas applicable.
 
Si la résidence décidée est celle des représentants légaux du mineur, ils doivent donner leur accord par écrit.
 
Chapitre IV – De la détention provisoire
Selon le Rapport d’information, « le nombre de mineurs placés en détention provisoire a augmenté de 10,3 % entre 2016 et 2017 ». Plus précisément, au 1er janvier 2018, 783 mineurs sont sous écrou : « 77 % (des mineurs) sont en détention provisoire, 23 % sont condamnés ». Nicole Belloubet souhaite donc limiter la détention provisoire, et la réserver aux faits graves. Les conditions sont donc plus strictes pour les mineurs.
 
Le Code prévoit ainsi qu’en plus d’être « l’unique moyen de parvenir à l’un des objectifs mentionnés à l’article 144 du Code procédure pénale », la mesure doit être « indispensable » et il faut également que les « éléments de personnalité préalablement recueillis » soient pris en compte (L. 334-2). C’est au juge des enfants, au tribunal pour enfants ou au juge des libertés et de la détention d’ordonner ou de prolonger cette détention.
 
Le juge peut aussi prononcer une « mesure éducative judiciaire provisoire » sachant qu’elle sera, par principe, obligatoire si le mineur est remis en liberté au cours de la procédure (L. 334-3). La première version du Code prévoyait une exception, dans le cas où « le magistrat estime qu’elle n’est pas nécessaire », qui n’a finalement pas été retenue. 
 
La détention provisoire pourra être ordonnée à l’encontre :
  • d’un mineur âgé de treize à seize ans s’il encourt une peine criminelle ou en matière correctionnelle s’il n’a pas respecté son contrôle judiciaire ; cette violation doit être « répétée et d’une particulière gravité » ;
  • d’un mineur âgé de plus de seize ans s’il encourt une peine criminelle, une peine d’emprisonnement d’au moins trois ans et « s’il s’est volontairement soustrait aux obligations d’un contrôle judiciaire ou d’une assignation à résidence avec surveillance électronique ».
Mais, un mineur de moins de treize ans ne peut être placé en détention provisoire (L. 334-1).
 
Source : Actualités du droit