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Livre II – De la spécialisation des acteurs

Pénal - Procédure pénale, Informations professionnelles, Droit pénal général
04/11/2019
Le Code pénal des mineurs prévoit dans son Livre II la spécialisation des acteurs de la procédure pénale applicable aux mineurs. Ce principe de spécialisation de la justice pénale des mineurs, rappelé dès l’article préliminaire du Code, est à valeur constitutionnelle.
Pour répondre à la nécessaire spécialisation, principe fondamental reconnu par les lois de la République, le rapport d’information propose d’« accroître la formation spécifique des magistrats des parquets pour mineurs et envisager une spécialisation de ces magistrats sur le modèle des juges des enfants » (Assemblée nationale, Rapport d’information, n° 1702, 2018-2019,  M.  Terlier J. et Untermaier C.).
 
Cette perspective a été confirmée par le budget de la Justice pour 2020 (v. Budget de la justice : l’effort d’investissement concentré sur le pénal, Actualités du droit, 30 sept. 2019). Il est prévu la création de :
  • 70 emplois pour la protection judiciaire de la jeunesse répondant à la réforme de la justice pénale des mineurs ;
  • 100 emplois de magistrats, notamment pour la réforme de la justice pénale des mineurs ;
  • 284 emplois pour la réforme, donc plus de 100 greffiers ;
  • une hausse du 17 millions d’euros dans le budget consacré à la protection judiciaire de la jeunesse, afin de mettre en œuvre la réforme en diversifiant la prise en charge mais aussi pour construire 20 centres éducatifs fermés.
Mais aujourd’hui, certains professionnels de la justice des enfants et des adolescents regrettent certaines exceptions toujours prévues. Ces derniers demandent d’ailleurs par le biais de leur plateforme commune que « les acteurs soient tous spécialisés », comme annoncé dans le rapport accompagnant l’ordonnance.

Le ministère public (Titre I) : « en cas d’urgence ou d’empêchement, les magistrats du ministère public spécialement désignés peuvent être substitués dans leurs attributions par tout magistrat du parquet au sein duquel ils exercent leurs fonctions » (L. 211-1).
 
Le juge d’instruction (Titre II) : la première exception prévoit que lorsque « le procureur de la République compétent en vertu de l'article 43 du Code de procédure pénale ouvre une information judiciaire dans un tribunal judiciaire qui n'est pas le siège d'un tribunal pour enfants, le juge d'instruction peut procéder à tout acte urgent d'information, à charge pour lui de se dessaisir dans le plus bref délai au profit du juge d'instruction du siège du tribunal pour enfants, tant à l'égard du mineur que des majeurs à l'encontre desquels l'information a été ouverte » (L. 221-1).
 
Lorsqu’une information judiciaire est ouverte dans un tribunal judiciaire autre que celui du lieu de résidence du mineur « le juge d'instruction peut, après avoir recueilli l’avis du procureur de la République, se dessaisir au profit du juge d'instruction du siège du tribunal pour enfants dans le ressort duquel le mineur a sa résidence » (L. 221-2)
 
Il est prévu à l’article L. 221-3 que le conseiller délégué à la protection de l’enfance sera membre de la chambre de l’instruction pour toutes les affaires impliquant un mineur.
 
Les juridictions de jugement (Titre III) : selon l’article L. 231-1, « sont compétentes les juridictions de jugement pour mineurs :
1° De la résidence du mineur ou de celle de ses parents ou représentants légaux ;
2° Du lieu où il a été placé à titre provisoire ou définitif ;
3° Du lieu de l'infraction ;
4° Du lieu où le mineur a été trouvé ».
 
Les compétences des différentes juridictions de jugement sont précisées aux articles suivants :
  • le juge des enfants est compétent pour les contraventions de la cinquième classe et des délits commis par des mineurs ainsi pour les contraventions des quatre premières classes si elles sont connexes aux premières infractions (L. 231-2) ; les professionnels demandaient, pour leur part, qu’il n’y ait « pas de peine encourue si la culpabilité a été prononcée par un juge des enfants seul en cabinet » (plateforme commune) ;
  • le tribunal pour enfants est pour sa part compétent pour les contraventions de la cinquième classe et délits commis par des mineurs de plus de treize ans, des crimes par les mineurs de moins de seize ans et des contraventions des quatre premières classes si elles sont connexes (L. 231-3). Et, « Lorsqu’il siège, le tribunal pour enfants est composé d’un juge des enfants, président et de deux assesseurs » selon l’article L. 231-4 du Code ;
  • la chambre spéciale des mineurs connaît des appels formés contre les décisions du juge des enfants et tribunal pour enfants, ainsi que des appels contre les jugements du tribunal de police (L. 231-6) ;
  • la cour d’assises des mineurs est, elle, compétente pour les « crimes commis par les mineurs âgés d’au moins seize ans », ainsi que les crimes « connexes ou (qui) forment un ensemble indivisible avec des crimes commis par des mineurs âgés d'au moins seize ans :
1° Des crimes et délits commis par les intéressés avant qu’ils n’aient atteint l’âge d'au moins seize ans,
2° Des crimes et délits commis par les intéressés à compter de leur majorité,
3° Des crimes et délits commis par leurs coauteurs ou complices majeurs ». (L. 231-9) ». Étant précisé que le président de la cour d’assises des mineurs et la cour exerceront respectivement les attributions dévolues au président de la cour d’assises et à la cour, les fonctions du ministère public sont remplies par le procureur général ou un magistrat du ministère public spécialement chargé des affaires de mineurs et les deux assesseurs sont pris, sauf impossibilité, parmi les juges des enfants du ressort de la cour d’appel.
 
Ce principe de spécialité des juridictions, qui peut donc être atténué en cas d’impossibilité ou de manque de moyens, est contesté par certains avocats : « il y a toujours une exception permettant de ne pas spécialiser la justice des mineurs », dénonce Dominique Attias, avocate du barreau de Paris.
 
La protection judiciaire de la jeunesse (Titre IV) : il est prévu que « La mise en œuvre des décisions prises en application du présent code est confiée, sauf s'il en est disposé autrement, aux services et établissements de la protection judiciaire de la jeunesse » (L. 241-1). Ces derniers étant tenus au secret professionnel. L’article suivant (L. 241-2) est relatif aux échanges d’informations relatives au mineur.
 
Rappelons que 70 emplois pour la protection judiciaire de la jeunesse vont être créées en 2020 (v. Budget de la justice : l’effort d’investissement concentré sur le pénal, Actualités du Droit, 30 sept. 2019).
 
Source : Actualités du droit