Retour aux articles

Intérêt à agir contre une ordonnance du juge-commissaire

Affaires - Commercial
21/06/2022
En l’absence d’intérêt à agir, il ne peut être exercé aucun recours contre l’ordonnance du juge-commissaire autorisant la résiliation du bail commercial conclu par la société en liquidation judiciaire : la démonstration que cette ordonnance affecte les droits et obligations de l’associée de la société débitrice ne peut résulter uniquement de la notification administrative qui lui en a été faite par le greffe.
Le juge commissaire statue par ordonnance sur les demandes, contestations et revendications relevant de sa compétence ainsi que sur les réclamations formulées contre les actes de l'administrateur, du mandataire judiciaire et du commissaire à l'exécution du plan. Les ordonnances du juge-commissaire sont déposées sans délai au greffe qui les communique aux mandataires de justice et les notifie aux parties et aux personnes dont les droits et obligations sont affectés ; sur sa demande, elles sont communiquées au ministère public.

Ces ordonnances peuvent faire l'objet d'un recours devant le tribunal dans les dix jours de la communication ou de la notification, par déclaration faite contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au greffe.

Ces dispositions, prévues à l’article R. 621-21 du code de commerce, sont rappelées par la cour d’appel statuant sur l’opposition formée contre une ordonnance du juge-commissaire.

Autorisation de résiliation du bail commercial

La SARL Z…, exerçant une activité de bar-restaurant-salon de thé dans le cadre de deux baux commerciaux, dont l'un conclu avec M. Y…, sur deux biens contigus, avait été mise en liquidation judiciaire le 19 avril 2017. Dans le cadre de cette procédure, le mandataire judiciaire avait déposé une requête devant le juge-commissaire, le 18 décembre 2018, aux fins de se voir autoriser à procéder à la résiliation du bail commercial conclu entre la SARL Z… et le bailleur Y...
 
Par ordonnance du 9 janvier 2019, le juge-commissaire avait autorisé cette résiliation ; celle-ci était motivée, d’une part, par l'impossibilité de mener à bien la vente aux enchères du fonds de commerce et, d’autre part, par l'engagement du bailleur de renoncer au paiement de l'ensemble des loyers courus dans le cadre de la procédure collective. Cette ordonnance ayant été notifiée par le greffe à Mme X…, associée de la SARL Z… et veuve de son gérant, celle-ci avait formé opposition le 22 janvier 2019. Le 22 août suivant, le bien immobilier était vendu à une SCI.
 
Par jugement du 5 juillet 2019, le tribunal de commerce avait déclaré irrecevable le recours de Mme X… contre l’ordonnance pour défaut de qualité à agir. Ayant interjeté appel de la décision, l'intéressée faisait valoir, notamment :
 
— que la notification de l'ordonnance qui lui avait été faite par le greffe constituait une reconnaissance de ce que ses droits en étaient affectés et justifiant qu'elle disposât d'une voie de recours ;
 
— qu'en sa qualité d'associée de la SARL Z… et de propriétaire des murs jouxtant ceux dans lesquels était exploité le fonds de commerce, elle était directement impactée par la résiliation du bail commercial qui avait totalement modifié la configuration du site.
 
Caractérisation de l’intérêt à agir
 
Pour la cour d’appel, il appartient à Mme X…, qui n’est partie ni à la procédure collective ni au contrat de bail, de démontrer que ses droits et obligations sont affectés, ce qui ne peut résulter uniquement d'une notification administrative faite par le greffe.
 
En l’espèce, Mme X… se contente de mettre en avant ses qualités de veuve du gérant de la SARL Z…, d'associée de cette société et de voisine mitoyenne du fonds de commerce, sans établir en quoi elles lui donnent l'intérêt à agir contre une ordonnance du juge-commissaire, autorisant le liquidateur à résilier un bail commercial, aux fins de faire cesser l'augmentation de la dette de loyer pour un fonds de commerce qui n'est plus exploité au moins depuis la date de la liquidation judiciaire.
 
Le jugement du 5 juillet 2019 est donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme Z… de son recours, de sorte que l'ordonnance du juge commissaire du 9 janvier 2019 est confirmée.
Source : Actualités du droit